TIRANNIDE indistintamente appellare si debbe ogni qualunque governo, in cui chi è preposto alla esecuzion delle leggi, può farle, distruggerle, infrangerle, interpretarle, impedirle, sospenderle; od anche soltanto deluderle, con sicurezza d'impunità. E quindi, o questo infrangi-legge sia ereditario, o sia elettivo; usurpatore, o legittimo; buono, o tristo; uno, o molti; a ogni modo, chiunque ha una forza effettiva, che basti a ciò fare, è tiranno; ogni società, che lo ammette, è tirannide; ogni popolo, che lo sopporta, è schiavo.

Vittorio Alfieri
(1790)


venerdì 8 maggio 2020

Jean Giono, Provence




Tempo di riflessioni, tempo di letture, tempo di scoperte. Provence, un piccolo grande libro, mai tradotto in italiano, di Jean Giono è stato uno dei doni che questo isolamento forzato ci ha portato.
Ne proponiamo un passo dalle prime pagine in cui Giono descrive con amore la varietà della sua terra illuminata dal sole che all'alba spunta da dietro i monti del Piemonte. E' un passo bellissimo, in un francese dolce e musicale che non abbiamo avuto il coraggio di tradurre proprio per non disperderne l'armonia. (G.A.)

Jean Giono

Provence

Mais dès que le jour se lève, la plus extraordinaire diversité s’étale sous le soleil. L’aube sortant du Piémont installe d’abord ses théâtres italiens dans les forêts du Briançonnais, sur les glaces du Pelvoux, les pâtures de l’Isère, les dents de scie du Vercors.

Elle saute plus bas, sur le sommet du Ventoux, de la montagne de Lure, plus bas encore sur Sainte-Victoire, sur Sainte-Baume. Elle ne touche encore la mer qu’au large. Près de la côte, de Marseille à Nice, ou, plus exactement, de Carry-le-Rouet à l’embouchure du Var, tout est encore dans l’ombre.

Il faudra attendre que les premiers rais du jour aient pénétré dans les sombres vallées de la Drôme, dans les noires gorges du Diois, avant de voir s’allumer la frange d’écume qui bouillonne contre les roches rouges du Trayas.

De forêts en glaciers, de pâtures en rochers, la lumière coule vers les vallons découvrant les montagnes mordorées du Nyonsais, les schistes bruns de Gap, les collines romantiques du Var, les déserts de Lure et du Canjuers; elle touche de vermeil la pointe des villages perchés dans les vallées de la Drôme, de la Durance, de l’Encrême, de l’Asse, du Buech, du Verdon.

Elle se glisse en même temps que la bicyclette du facteur dans la cour fortifiée des fermes hautes du plateau d’Albion; elle se pose enfin dans la large Crau, sur les graviers de marbre faisant mousser une longue herbe blonde transparente comme du verre. Maintenant, la mer étincelle comme le bouclier d’Achille; les yachts s’enflamment de pavois en rade de Cannes; le café fume devant les huttes de charbonniers dans les solitudes du Var; les douaniers vont chercher le journal à Montgenèvre; les flamants roses s’élèvent du Vaccarès; le pluvier fait courir son fil bleu dans les roseaux du Rhône; la grive appelle sur les pentes du Ventoux; le blaireau rentre à sa tanière, dans les déserts de Lure; les maraîchers discutent aux terrasses des cafés de Cavaillon; les pêcheurs de Cassis commencent leurs premières parties de boules; Marseille a lâché tous ses autobus dans les rues; Grenoble compte ses pitons et ses cordes; Valence se réveille au sifflet de ses chalands; l’odeur du pain frais embaume des centaines de bourgs, mille villages.

Les écoles perdues dans les bois avalent des petits enfants à la tête en boule; l’alouette grésille en Crau, le corbeau croasse dans l’Alpe, l’aigle tourne au-dessus de Lure; les troupeaux font fumer les chemins autour des Alpes; les tankers soulignés de rouge mugissent au pont de Caronte. L’étang de Berre éblouit Saint-Chamas.

Tout le Sud est en train de vivre.


Jean Giono
Provence
Édition d'Henri Godard
Collection Folio, 1995